Samedi soir 20h30 j’arrive dans le quartier soit disant mal famé de la Boca a Buenos Aires. La il y a le théâtre du Grupo de teatro Catalina Sur.
Le spectacle commence a 22h seulement mais je vois plein de gens arriver au théâtre Pourquoi les spectateurs sont ils tant en avance, pourquoi se font ils tous la bise ?
Ce ne sont pas les spectateurs mais les cent comédiens, groupe de voisins du quartier, qui viennent répéter et s’échauffer !
Le théâtre :
un grand hall d’accueil, convivial avec un bar qui vend des pâtisseries, empanadas et tartes faites maison.
La salle contient 300 places réparties sur deux gradins de part et d’autre de l’espace scénique ( pas surélevé). Il y a un balcon a doit et a gauche de la scène qui sert également d’espace de jeu et ou se trouve notamment l’orchestre
Le prix : 15 pesos (3,5 euros)
Les horaires : tous les vendredis et samedi a 22h
Grupo Catalina Sur : c’est un groupe de voisins qui voient dans le théâtre la possibilités de communiquer avec d’autres voisins. A travers le théâtre ils tentent de se rappeler leurs histoires individuelles et collectives, de donner espoir en un monde meilleur
Je rencontre Helena Dressler une des plus anciennes du groupe.
interview- extraits:
"Je suis d’origine allemande. Depuis 1991 je fais partie du Groupe Catalinas. Appartenir a ce groupe m’a changé la vie.Ca te mets dans une activité complètement différente de celle que tu as l’habitude de faire. Je travaillais dans la finance et a gestion. Venir au théâtre a été pour moi comme un thérapie. Ca m’a détendue, ça m’a changée : ça m’a mis la vie en couleur, ça m’a sorti des numéros et des mathématiques !
J’ai appris beaucoup de choses : a chanter, a jouer, a me développer, a vaincre ma timidité, mes peurs. Et surtout cela m’a apporter quelque chose d’essentiel pour moi : avoir des amis.
On travaille jour après jour à maintenir cette structure. Ce n’est pas facile car c’est une grande structure avec beaucoup de coûts. Mais bon on a la chance de remplir la salle tous les jours !
Ce groupe s’est créé en 1983 lors de l’avènement de la démocratie. Il y avait une association au collège qui a commencé à faire des fêtes théâtrales sur la place du quartier. Puis ils ont appelé un metteur en scène, Adhemar Bianchi pour devenir un vrai groupe de théâtre Le groupe n’était pas si important qu’aujourd’hui, il y avait 20-30 personnes. Ils montaient des pièces qu’ils jouaient 2 ou 3 fois.
En 1990 après beaucoup d’efforts, de réunions, d’improvisations une pièce a été créée sur l’immigration. Une pièce très forte, avec bcp d’émotion. J’ai vu la pièce un samedi et le samedi suivant je jouais dedans ! On a eu beaucoup de succès.
On se réunit le mercredi soir et on joue tous les vendredis et samedis soirs. En période de création on répète tous les jours, le soir quelque fois jusqu’à une heure du matin.
On est tous bénévoles.On a la satisfaction de participer a un tel projet, c’est un plaisir. De toutes façons on ne pourrait pas être payés, on est trop nombreux ! Au début on était tous du quartier mais aujourd’hui il y a des gens qui viennent de partout. Certaines personnes en faisant partie de se groupe ont découvert leur vocation de comédiens et sont maintenant professionnels. "
La
pièce : El Fulgor Argentino ( l’éclat argentin)
création collective, mise en scène Adhemar Bianchi
L’histoire :
C’est l’histoire d’un club social et sportif argentin, el Fulgor, et de sa vie entre 1930 et 2030.
Il ouvre ses portes en 1930 avec les bals, puis il y a le coup d’état militaire, l’arrivée de Peron et d’Evita, un nouveau coup militaire etc…
On assiste a l’histoire mouvementée de ce pays, entre lutte pour la liberté, contre la pauvreté et les différents gouvernements plus ou moins corrompus.
On traverse le temps, accompagné des musiques, des danses, des tenues de chaque époque.On suit l’histoire d’un couple : une fille de bonne famille qui rejoint son amoureux militant.
Le spectacle : Un spectacle musical avec chanson, orchestre live, grandes marionnettes, de la couleur ! Cent personnes sur scène de tous ages : de 5 a 70 ans ?
Tous énormément investis et heureux d’être la, heureux de partager leur message d’espoir et de révolte.
Un spectacle d’une qualité inouïe : les 100 comédiens sont supers discipliné ( aucun couac, aucun bruit dans les coulisses, tout est d’une grande précision), et très doués ( pas d’amateurisme, pas de déclamation ou de récitation du texte). Les parties chantées sont merveilleuses, professionnelles.
Et le fond, l’histoire, le message sont prenants.
Extrait de la chanson finale :
« Et s’il vous plait
que personne ne dise « l’utopie est morte »
Ici il y a 100 utopistes
qui par amour
avons mis toute notre âme dans la représentation
Et si nous avons réussi a toucher votre cœur
notre utopie s’est réalisée
Pour se monde dont nous rêvons
sans injustice et libre
car nous pensons que c’est quand même possible
c’est pour ça que nous sommes la.
En chantant
que nous sommes vivants, c’est ça qu’il faut fêter
Nous sommes l’histoire que le futur va nous raconter
Avec la mémoire
l’espérance
résistera.
Ce sont nos voix qui entonnent la retraite.
Ce sont nos voix qui ne se tairont jamais.
Chantant toujours pour notre histoire
pour la mémoire, la dignité. »