accueillivrecontact

Mai 2007

9ème étape de notre tournée


*** Rencontre avant la représentation d’« epia a una mujer que se mata » (Un homme qui épie une femme qui se tue), l’adaptation de Veronese de la pièce de Tchekhov, Oncle Vania.
Malena Figo qui joue Sonia
Fernando Llosa qui joue son père
Osmar Nuñez qui joue Vania

Comment etes vous devenus comédiens ? Pourquoi ?
M : Mes parents sont eux-mêmes comédiens donc depuis toute petite j’assiste a des spectacles, je les suis en tournée. Et très tôt ce qui m’a fasciné c’est le passage d’une personne normale qui boit un café et nous parle de sa vie à un personnage imaginaire sur scène. Je me disais mais qu’est-ce qu’il se passe ?! Une transformation incroyable. Un comédien boit son café comme tout le monde et quelques instants plus tard, il est quelqu’un d’autre qui pleure, qui aime, qui peut même mourir ! C’est cette magie, qu’on ne trouve qu’au théâtre, qui m’a attirée.
J’ai donc suivi plusieurs cours particuliers (pas dans des écoles) avec différents professeurs comme Lizardo Laphizt ou Agustin Alezzo.

O : Il n’y avait rien qui me motivait particulièrement. Mais dès tout petit j’aimais jouer, faire l’acteur. Je n’avais aucune référence théâtrale ; je ne suis pas allé au théâtre avant l’adolescence. Je suppose que ce désir venait de la télévision... Je faisais des mises en scène avec mes petits copains, des versions de Roméo et Juliette, d’Hamlet.
Ah oui, je pense que ce qui a du m’orienter vers le théâtre c’est mon goût pour la littérature. J’ai commencer a lire très tôt : a 5 ans je lisais bien. J’ai lu tout ce qui me passait entre les mains et notamment du Shakespeare assez tôt.
Je me suis donc dirigé vers ce métier. J’ai suivi notamment la formation de l’Ecole Municipale de Buenos Aires.

Quelle est la vie d’un comédien en Argentine ?
Tous ensemble : Difficile, pleine de doutes, incertaine !
F : Il n’y a aucun type de protection, d’aide. Contrairement a d’autres pays comme, je crois, les Etats- Unis ou la France, il n’y a pas d’aide financière et produire est très difficile, on se saigne pour monter un projet. Il y a juste l’exception des théâtres publics très peu nombreux. On est énormément de comédiens pour très peu de ces places privilégiées. Et encore, dans les publics, ils répètent 3 mois et jouent 3 mois et donc sont des comédiens professionnels pendant 6 mois !
O : Oui mais même aujourd’hui dans le théâtre public tu gagne beaucoup moins qu’avant. Depuis la crise de 2001, ça été divisé par deux !
Le théâtre indépendant est celui qui fait que le théâtre perdure. Car le théâtre public est surtout un théâtre de répertoire, très structuré. Les créations sont quasi inexistantes.
Le théâtre indépendant arrive à obtenir des aides mais elles ne suffisent pas à payer les comédiens et surtout, quand elles arrivent, elles arrivent bien trop tard.

On peut vivre que du métier de comédien ?
F
: en général on compense avec des cours.
O : Oui moi je donne des cours de théâtre J’arrive a vivre de mon métier.
M : Oui moi aussi mais c’est un privilège. Ce n’est pas le cas de tout le monde.
O : Au début j’ai fait des boulots qui n’avaient rien a voir avec ma vocation mais il fallait bien vivre ! C’est ça qui est très bizarre a Buenos Aires : il y a une quantité incroyable de spectacles alors que très peu de comédiens arrivent a en vivre !
F : Je crois que je sais pourquoi. Je crois que le théâtre off est très productif et d’une grande qualité car la pauvreté te donne une liberté absolue. Tu n’as de compte ni d’argent à rendre n’a personne, tu crées ce que tu veux créer. Tu fais ce que tu as envie de faire et tu ne fais pas quelque chose avec un but commercial.
O : C’est vrai. C’est dans le théâtre off que naissent les nouvelles tendances, les nouvelles idées, les nouveaux regards… C’est aussi une forme de résistance : le système ne m’aide pas, mais je résiste et je veux quand même dire quelque chose.

Comment trouve t’on du travail ? Comment avez-vous fait partie de cette pièce ?
O : Daniel Veronese nous a convoqué. C’est un des metteurs en scène les plus importants d’Argentine en ce moment. Il a participé au renouveau du théâtre à Buenos Aires. Lui et quelques autres dramaturges (il est également auteur) ont modifié certaines tendances bourgeoise du théâtre en Argentine.
Il nous a vu dans d’autres spectacles et nous a réunis. On forme presque une compagnie avec Veronese. On a déjà travaillé avec lui sur une autre pièce.
M : Pour trouver du travail on dépose aussi nos CV et photos dans les agences pour passer des castings.C’est un travail dur ça !
O : En fait il faut travailler pour trouver du travail !
M : effectivement je crois que le mieux c’est de jouer et qu’on te voit sur scène. Parce que les cv et photos je pense qu’ils finissent souvent a la poubelle.

Avez-vous des rituels avant d’entrer sur scène ?
O : moi je bois du whisky. J’avais arrêté et l’avais remplacé par de la relaxation mais je recommence, ça marche beaucoup mieux !
M : moi je fais des étirements, je m’échauffe la voix, de choses comme ça. Ca dépend aussi de pièces.
O : Oui des échauffements. C’était une blague le whisky quoique dernièrement avec Vania, ça m’aide !

Y a-t-il des mots porte bonheur avant d’entrer sur scène ?
O et M :
Merde.
O : On dit merde en français et pas mierda.

Existe-t-il des superstitions, des choses interdites, qui portent malheur ?
O : la couleur jaune, dire « bonne chance »
M : il ne faut surtout jamais dire « vipère » ou alors il faut absolument mettre sa main sur son sein gauche (ce qu’elle fait immédiatement) si on est une fille ou sur sa testicule gauche si on est un garçon ! Mais on peut dire serpent…
O : y en a plein de superstitions !
M : Il y a aussi des choses qui portent chance, comme de découvrir un clou sur la scène. Du coup moi je m’en apporte un tous les jours que je fais semblant de trouver !

Selon vous quelles sont les qualités nécessaires a un bon comédien ?
O : De la sensibilité, fondamentalement. De l’intuition. Ne pas avoir de préjugés, être ouvert. Pour être capable de jouer n’importe quel personnage, de le défendre, de le comprendre. Or les préjugés tout le monde en a, c’est l’un des grands défauts des comédiens.


*** Ils étaient 10 a créer Open House de Daniel Veronese. Ils sont aujourd’hui 7 a continuer de jouer tous les lundi cette pièce.
Rencontre avec 5 d’entre eux.

Comment se sont créés ce groupe et cette pièce Open House ?
Le groupe s’est formé autour d’un projet de fin d’étude au Conservatoire National d’Art dramatique, devenu par la suite IUNA (institut Universitaire National de Artes). Nous étions donc camarades de classe et on voulait trouver un metteur en scène qui accepte de monter une pièce avec nous pour 8 ou 12 représentations. Ca c’était il y a 7ans, c’est comme ça que le groupe s’est formé.
Pour créer cette pièce on a fait des recherches, des improvisations qui ont fini par se regrouper autour d’une thématique : l’abandon, la tristesse, la solitude. La pièce a vue le jour après 8 mois de recherches, de répétitions, tous les jours.

Comment s’est passée la rencontre avec Daniel Veronese ?
Son travail nous intéressait, on lui a téléphoné ! C’était le premier sur notre liste et il a accepté. Quand on l’a rencontré on s’attendait plus à une réponse négative. On a été surpris merveilleusement.
Il nous a donné des choses à lire et c’est comme ça qu’on a commencé.

D’où vient cette idée d’un spectacle qui ne s’arrête jamais sinon de mort naturelle ?
C’est venu plus tard.
Oui, on a fait une tournée en Belgique, en Italie, en Espagne et ça c’est très bien passé. C’est à ce moment que Daniel a eu cette idée de continuer la pièce pour toujours, de ne pas remplacer les comédiens s’ils décidaient de partir et de se servir de cette perte, de l’intégrer à la pièce qui parle déjà de ça. En 7 ans la pièce a donc beaucoup évoluée, il y a eu beaucoup de changements dans le texte vu que 3 comédiens sont partis et que le lapin est mort. Nous étions 10 au départ.
L’idée c’est que le temps affecte la pièce, la modifie, la détruit et qu’à un moment elle va mourir comme un être vivant.

Et pour vous les comédiens, qu’est ce que ça fait de jouer une pièce sans interruption pendant 7 ans ?
C’est une expérience nouvelle et unique pour chacun d’entre nous. Ce qui est intéressant c’est qu’on travaille à éviter toute forme de mécanisation qui peut arriver à un comédien quand il joue longtemps la même chose. C’est un grand défi, de maintenir tout vivant, de garder l’émotion…

Comment vivez- vous en tant que comédiens ?
Rires.
Quasiment personne ne vit du théâtre.
Pas avant très longtemps. La majorité des personnes qui finalement arrive a en vivre on déjà l’age d’être a la retraite !
Je crois que les difficultés on a tous un autre travail a coté, souvent en rapport avec le théâtre : l’enseignement, la production.Car on ne peux pas jouer dans 8 pièces. Donc on joue dans une, on donne des cours, on en produit une autre, on fait les costumes dans une troisième…
Ce qui se passe c’est que dans le théâtre indépendant tu ne gagnes pas d’argent, jamais, ou si peu. Et tu es très chanceux si tu n’as pas à investir de l’argent pour jouer.
Il faut quand même dire que ces dernières années les aides sont plus accessibles (Prix annuel de Fondation Altocha donne un prix, Prix de l’institut National de théâtre tous les deux ans). Mais il y a de plus en plus de pièces.
Du coup comme on travaille a coté on répète le soir, à minuit, ou le week end !
C’est comme avoir une double vie.

Est-on considéré comme comédien professionnel quand on ne gagne pas d’argent ?
Oui. Un comédien professionnel est un comédien qui joue. On fait partie de la corporation/ syndicat des comédiens.
Pour gagner de l’argent on pourrait entrer dans le théâtre public ou le théâtre commercial. Mais ce n’est pas ce qui nous intéresse. D’ailleurs il n’y a plus de théâtre national. Le Théâtre Cervantes est fermé à cause de dispute entre syndicat des techniciens et l’état. Il n’y a plus que le théâtre municipal, San Martin.

Comment cherche t’on ou trouve t’on du travail ?
C’est très rare qu’il y ait des castings dans le théâtre indépendants. En général se sont des groupes qui se connaissent déjà. Les metteurs en scène prennent des gens qu’ils connaissent, qu’ils ont vu jouer.
Les metteurs en scène vont beaucoup au théâtre, donc se n’est pas rare d’être remarqué à cette occasion.
C’est difficile il faut réussir a se vendre comme si on était un produit.
Il faut avoir beaucoup d’auto gestion : Si tu n’as jamais travaillé et que personne ne te connais, tu dois de regrouper avec d’autres comédiens, trouver un auteur et un metteur en scène et jouer.

Quels sont les dramaturges argentins de référence :
Daniel Veronese, Rafael Spregelburd, Mauricio Kartun, Javier Daulte.
Il y a aussi les classiques, des pièces qui étaient bonnes à leur époque, même transgressives, mais aujourd’hui elles sont un peu passées. Comme Cosa…

Comment le comédien est-il considéré en Argentine ?
Quand on dit qu’on étudie le théâtre on nous dit « ok, mais pour de vrai tu vas faire quoi ? »
Mais sinon le comédien en lui-même est assez reconnu. Rien a voir évidemment avec un acteur de la télé. Par contre les comédiens sont considérés plus sérieux que ceux de la télévision.

Cliquez sur la photo
pour avoir un agrandissement
et sa légende

image
Malena Figo
image
Osmar Nuñez
image
Les comédiens de Open House


decoCommenter la page Afficher les commentaires Il y a 0 commentaires actuellement


remonter
decoEnvoyer à un amiCommenter la page
Il y a 0 commentaires sur cette page